Barrage hydraulique

Accès au marché de l’hydroélectricité en France : ARENH hydro, VPP ou hybride ?


Résumé :


Cet article analyse le compromis franco-européen de 2025 relatif aux concessions hydroélectriques, qui substitue au régime historique de concession un système d’autorisation couplé à la mise aux enchères de 6 GW de capacités « virtuelles » sous la supervision de la CRE.

Trois architectures de marché sont en balance : un ARENH hydro, des enchères de Virtual Power Plant (VPP), ou un modèle hybride.

L’article mobilise la littérature théorique et empirique sur les marchés électriques pour discuter les avantages et limites de chaque mécanisme et propose des recommandations de design institutionnel adaptées au contexte français.


Introduction :


Depuis plus de vingt ans, la question de l’ouverture du parc hydroélectrique français à la concurrence a suscité de vives tensions entre Paris et Bruxelles.

L’hydroélectricité représente la deuxième source de production électrique en France, après le nucléaire, et constitue la première source d’électricité renouvelable (Le Figaro/AFP, 2025).

Pourtant, les contentieux autour du régime de concession ont freiné les investissements nécessaires à la modernisation du parc (Les Échos, 2025).

L’accord de principe conclu en août 2025 entre le gouvernement français et la Commission européenne constitue une étape décisive : il prévoit la conversion des concessions en autorisations et la mise aux enchères de 6 GW de capacités hydroélectriques « virtuelles » sous le contrôle de la CRE (Reuters, 2025 ; Connaissance des Énergies/AFP, 2025 ; AEF Info, 2025).

Cet article s’interroge sur les modalités optimales d’accès au marché dans ce nouveau cadre.

Trois instruments peuvent être envisagés : un ARENH hydro (Lévêque, 2011 ; Percebois, 2012), des enchères de VPP (Ausubel & Cramton, 2010 ; Armstrong & Galli, 2009), ou un compromis hybride (Fabra & Llobet, 2025 ; Benatia, 2025).


1. L’ARENH hydro : continuité et risques d’aides d’État.


Le mécanisme ARENH hydro offrirait une stabilité de prix et une visibilité aux fournisseurs alternatifs, ce qui favoriserait la concurrence en aval (Lévêque, 2011).

Toutefois, il présente un risque élevé de requalification en aide d’État si le tarif administré est inférieur au coût économique de l’eau (Percebois, 2012).

De plus, en affaiblissant le signal prix, il pourrait décourager les investissements dans de nouvelles capacités.


2. Les enchères de VPP : discipline de marché et transfert du risque.


Les VPP, expérimentés en France et ailleurs, reposent sur des enchères attribuant des droits d’option sur des volumes d’électricité valorisés au prix de marché (Ausubel & Cramton, 2010).

Ce mécanisme respecte les signaux de prix et accroît la liquidité des marchés (Armstrong & Galli, 2009).

Il transfère cependant le risque hydrologique et de prix aux entrants, ce qui peut limiter l’efficacité concurrentielle en cas de volumes trop réduits.


3. Un modèle hybride : stabilité et incitations.


Le compromis ARENH–VPP combine une part régulée et une part indexée au marché.

Cette approche préserve les incitations à investir tout en garantissant une visibilité minimale aux fournisseurs (Fabra & Llobet, 2025 ; Benatia, 2025).

Sa complexité de gouvernance constitue néanmoins un défi, qui implique un calibrage attentif de la CRE.


4. Éclairages empiriques et recommandations.


Les expériences étrangères (DOE, 2025 ; CERRE, 2025) et la littérature académique (Allaz & Vila, 1993 ; de Frutos & Fabra, 2011 ; Cramton et al., 2025) convergent sur l’importance des produits forward et des options pour discipliner le marché spot tout en réduisant le pouvoir de marché.

Dans le cas français, il apparaît souhaitable de privilégier un modèle hybride, reposant sur une allocation transparente de volumes différenciés (base, pointe, flexibilité), des enchères au format horloge ascendante simultanée, et un pilotage dynamique par la CRE.


Conclusion :


Le compromis franco-européen d’août 2025 ouvre une nouvelle ère pour l’hydroélectricité française.

Entre stabilité des prix et respect des signaux de marché, la conception du mécanisme d’accès au marché conditionnera le succès du dispositif.

Un modèle hybride semble le mieux à même de concilier concurrence, sécurité d’approvisionnement et incitations à l’investissement.

Au-delà du cas français, cette réflexion éclaire les débats européens sur la régulation des actifs existants dans la transition énergétique.


RÉFÉRENCES bibliograhiques :



KeyWoRDS :


Direction des Études Économiques.

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