Portrait Charles-Maurice de Talleyrand-Périgord

Pourquoi un CfD nucléaire ne peut être assimilé à un ARENH symétrique : entre corridor tarifaire et prix administré unique.

Un Contrat pour Différence (CfD) appliqué au nucléaire ne saurait être assimilé à un dispositif de type ARENH symétrique, tant leurs logiques économiques et leurs structures juridiques divergent profondément.

Par construction, le CfD repose généralement sur l’établissement de deux bornes tarifaires distinctes : un prix plancher et un prix plafond.

Ce mécanisme crée un corridor de rémunération au sein duquel le producteur assume la variabilité des prix de marché, tout en bénéficiant d’une protection contre les extrêmes.

Si le prix de marché tombe en deçà du plancher, une compensation lui est versée ; s’il excède le plafond, l’excédent est reversé au système – souvent via une entité publique – au bénéfice du consommateur ou de l’État.

À l’inverse, le mécanisme ARENH, y compris dans sa version dite « symétrique », repose sur un principe tout autre : un prix unique, administré, qui fait simultanément office de plancher pour le producteur et de plafond pour le consommateur.

Il n’y a donc pas de corridor, mais un point d’équilibre rigide, sans marge d’ajustement aux conditions de marché.

Cette approche, fondée sur une régulation centralisée, traduit une volonté de stabilité immédiate, mais fait peser sur l’opérateur historique l’intégralité des risques liés à l’évolution des prix de marché.

Monsieur Fabien Choné, président des sociétés FABELSI, CALOPTIM, 1725 et HGD, cofondateur et directeur général de Direct Énergie de 2003 à 2019, puis cofondateur et président de l’ANODE de 2006 à 2018, affirme dixit :

« Il va de soi que le volume de production vendue doit correspondre au volume effectivement produit. Il va de soi également que tous les acheteurs — y compris le fournisseur historique EDF — doivent assumer le risque de disponibilité, et en répercuter le coût sur leurs clients. »

Il rappelle à ce titre que l’amendement récemment introduit précise que les tarifs réglementés de vente d’électricité (TRVE) doivent refléter l’intégralité des coûts du système électrique français, sans exception.

Poursuivant son raisonnement, il affirme :

« J’irai même plus loin : les fournisseurs doivent aussi supporter le risque lié à la non-compétitivité éventuelle du parc nucléaire, et en reporter le coût sur leurs clients dans le cadre d’un contrat pour différence (CfD), autrement dit d’un ARENH symétrique — désormais autorisé par la nouvelle directive européenne. »

Et de conclure par une mise en garde explicite :

« Ceux qui s’opposent à cette orientation risquent, en cas d’effondrement des prix de marché, de jouer un bien mauvais tour à EDF. »

Il est vrai que certains CfD peuvent être conçus avec un prix unique – le plafond étant alors égal au plancher – notamment dans des contextes très spécifiques, tels que les projets nucléaires bénéficiant d’un soutien étatique fort.

Toutefois, la doctrine européenne actuelle privilégie clairement une architecture à deux seuils, offrant un partage explicite du risque de marché entre producteur et collectivité, conformément aux lignes directrices de la Commission sur les aides d’État à l’énergie.

Assimiler un CfD nucléaire à un ARENH symétrique, c’est donc méconnaître la différence de nature entre un mécanisme à ajustement bidirectionnel et un tarif administré univoque.

Là où le CfD introduit une flexibilité encadrée et une responsabilisation des acteurs face aux signaux économiques, l’ARENH traduit une logique de stabilisation, certes rassurante à court terme, mais peu compatible avec les impératifs de soutenabilité des investissements et de résilience du système électrique à long terme.


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